Suivi de l’éducation et de la formation 2016 : l’investissement public et l’inclusion restent deux priorités majeures pour l’Europe

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Le 7 novembre dernier, la Commission européenne a publié son rapport annuel sur la situation de l’éducation et de la formation au sein de l’UE - le Rapport de suivi de l’éducation et de la formation 2016. Ce dernier évalue les performances de l’UE et de ses Etats membres dans le domaine de l’éducation et de la formation en regard des valeurs de référence définies dans le cadre du programme Education & Formation 2020 (EF2020). Il présente et examine en outre plusieurs initiatives politiques en faveur de l’éducation mise en œuvre dans différents Etats membres. L’édition de cette année se base principalement sur les données de 2014 et s’intéresse plus particulièrement à la migration et à la crise des réfugié(e)s. Le rapport présente un aperçu de l’évolution générale des progrès réalisés en faveur des objectifs EF2020, complété par 28 rapports individuels par pays, rédigés dans chacune des langues de l’UE.

Le Rapport de suivi annuel de l’éducation et de la formation est de plus en plus souvent utilisé dans les débats politiques, mais représente également pour le Semestre européen de la Commission l’une des principales sources pour son analyse des défis et des nouvelles politiques dans le domaine de l’éducation. Il met en avant les priorités pour l’éducation les plus en demande d’investissement et identifie les politiques de réforme pour 2017 susceptibles d’être intégrées aux Recommandations spécifiques par pays 2017 du Semestre européen, ainsi qu’aux autres recommandations et discussions politiques.

L’an dernier, les résultats ont révélé l’absence d’investissement adéquat dans l’éducation comme étant l’un des problèmes majeurs au sein de l’UE : la plupart des Etats membres ont réduit leurs dépenses consacrées aux secteurs publics dans le contexte des mesures d’austérité. Selon le rapport, en 2014, l’investissement public dans l’éducation a enregistré pour la première fois en trois ans une augmentation moyenne de 1,1 % au sein de l’UE. Par rapport à l’année précédente, les investissements dans l’éducation publique ont augmenté de plus de 5 % en Bulgarie, en Hongrie, en Lettonie, à Malte, en Roumanie et en Slovaquie. Le rapport se garde toutefois de reconnaître que, malgré cette augmentation positive, le montant total des dépenses publiques réservées à l’éducation reste nettement inférieur au niveau enregistré avant la crise dans la plupart des Etats membres. A titre d’exemple, en Roumanie, pays pourtant classé parmi les bons élèves de l’UE, la part actuelle de l’investissement public dans l’éducation (8,6 %) demeure toujours largement en-deçà du niveau de 2010 (10,5 %). Si le financement public de l’éducation réalisé par l’UE a effectivement augmenté au cours de l’an dernier, plusieurs pays continuent néanmoins à amputer leurs budgets de l’éducation : Autriche, Belgique, Croatie, Chypre, Estonie, Finlande, Grèce, Italie, Lituanie et Slovénie. Comme le démontre le CSEE dans son rapport « Situation du financement de l’éducation, conditions de travail des enseignant(e)s, dialogue social et droits syndicaux dans les pays d’Europe centrale et orientale », la détérioration des systèmes d’éducation et des conditions de travail des enseignant(e)s s’observe le plus souvent dans les pays ayant réduit progressivement leur budget de l’éducation au fil des ans, par rapport à ceux ayant opté pour une coupe budgétaire ponctuelle et unique, confirmant ainsi que l’éducation reste une cible facile pour les assainissements budgétaires prévus par le Pacte de stabilité et de croissance.

En ce qui concerne l’analyse des progrès réalisés par l’UE en faveur des objectifs thématiques du programme EF2020, le rapport révèle que :

  • L’UE est proche d’atteindre l’objectif EF2020 prévoyant un taux d’abandons scolaires précoces inférieur à 10 % : entre 2014 et 2015, ce pourcentage avoisinait les 11 %.
  • Le taux d’achèvement dans l’enseignement supérieur a considérablement augmenté à travers l’UE en 2015 : le taux moyen de réussite est actuellement de 38,7 %, alors que l’objectif visé est d’atteindre 40 % de diplômé(e)s dans l’enseignement supérieur pour la tranche d’âge des 30-34 ans d’ici 2020.
  • On observe pour ces deux objectifs un écart significatif entre les jeunes issu(e)s de la migration et les ressortissant(e)s nationaux/ales : en 2015, on enregistrait un taux d’abandons scolaires précoces plus élevé (19 %) et un taux de réussite moins élevé dans l’enseignement supérieur (36,4 %) parmi les élèves issu(e)s de la migration, en comparaison des ressortissant(e)s nationaux/ales (10,1 et 39,4 % respectivement).

Toujours selon le rapport, plusieurs Etats membres ont pris un certain nombre de mesures pour combattre ces inégalités au sein de l’éducation. A titre d’exemple, l’Allemagne envisage le recrutement de plus de 40 000 enseignant(e)s et de plusieurs milliers de travailleurs/euses sociaux/ales, ainsi que la création d’environ 300 000 nouveaux postes au sein de son système éducatif ; la Finlande a augmenté son soutien financier aux municipalités pour l’organisation des classes préparatoires ; et la Belgique a renforcé la capacité des classes d’accueil et augmenté le nombre de professeur(e)s de langues.

Le rapport met en exergue l’importance du rôle des enseignant(e)s dans l’instauration d’un enseignement inclusif, la prévention de l’abandon scolaire précoce et la lutte contre les mauvaises performances dans certaines matières, notamment en mathématiques où le taux d’échec s’élève à 22,1 % (l’objectif EF2020 étant fixé à 15 %). L’augmentation du nombre de réfugié(e)s et de migrant(e)s se présentant aux frontières de l’UE, dont 30 % ont moins de 18 ans, nécessite non seulement de recruter des enseignant(e)s supplémentaires, mais également de garantir la qualité des programmes de développement professionnel continu et de formation initiale des enseignant(e)s, afin de leur permettre d’exercer leur profession dans des environnements chaque jour plus diversifiés. Le rapport indique, par exemple, que les enseignant(e)s de l’UE sont de plus en plus nombreux/euses à demander l’autorisation d’enseigner la langue de leur établissement scolaire en tant que « première langue étrangère » et de l’utiliser comme langue d’enseignement pour d’autres matières.

Le CSEE explique également que l’investissement public et l’inclusion sont les principales priorités des systèmes d’éducation européens actuels et demande de mettre davantage l’accent sur le statut de la profession enseignante et le développement professionnel des enseignant(e)s. Martin Rømer, Directeur européen du CSEE a commenté le rapport de Suivi de l’éducation et de la formation 2016 : « L’éducation doit bénéficier d’un financement efficace et suffisant : les Etats membres doivent accroître l’investissement public en faveur de l’éducation équitable et de haute qualité pour toutes et tous. Une approche plus positive de l’éducation publique de haute qualité constitue une base pour offrir des opportunités d’apprentissage à tous les enfants et tous les jeunes, indépendamment de leur origine migrante ou de leur situation socio-économique. Parallèlement, face à la multiplication des défis et des demandes sur le plan sociétal, la formation initiale et le développement professionnel continu des enseignant(e)s doivent se voir accorder davantage d’attention et de ressources. »