Un Collège national des enseignants hongrois

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En 2013, le gouvernement hongrois a décidé de créer un Collège des enseignants, censé fonctionner par la suite comme une chambre nationale des enseignants. Cette nouvelle a rapidement fait le tour des syndicats de l'éducation européens, et plusieurs organisations membres du CSEE ont exprimé leurs inquiétudes face à cette situation. Nous avons demandé un complément d'information à Mme Piroska Gallo, Présidente du PSZ-SEHUN - le plus grand syndicat d'enseignants du pays.

CSEE : Pourquoi le gouvernement hongrois a-t-il décidé de créer ce Collège des enseignants ?

PSZ-SEHUN : D'après le gouvernement, l'objectif était de consulter le Collège d'enseignants pour toutes les questions professionnelles touchant à l'éducation, au lieu de mener des consultations auprès de plusieurs organisations professionnelles. Le PSZ-SEHUN s'est fermement opposé à cette mesure, qui confère notamment au Collège le droit de défendre les intérêts des enseignants.

CSEE : Le gouvernement a-t-il invité les syndicats d'enseignants à participer au processus de consultation pour cette mesure ?

PSZ-SEHUN : Lorsque nous avons été informés du projet gouvernemental visant la création d'un Collège d'enseignants, nous avons contacté le ministre de l'Education, avec qui nous avons eu plusieurs entretiens à titre consultatif.  Le PSZ-SEHUN a finalement réussi à faire adopter une loi stipulant clairement que les droits et les acquis des syndicats d'enseignants doivent être pris en considération. C'est pourquoi nous avons toujours tout fait, jusqu'à ce jour, pour éviter une situation intenable, où le Collège des enseignants porterait atteinte aux droits syndicaux.

CSEE : Comment fonctionne le Collège des enseignants hongrois ?

PSZ-SEHUN : La loi rend obligatoire l'adhésion des enseignants au Collège. Tous les enseignants travaillant dans des institutions scolaires dont la direction et la gestion sont assurées par les municipalités (ex. l'éducation de la petite enfance) ou par l'Etat (les autres secteurs de l'éducation) ont l'obligation de s'affilier au Collège. Pour l'heure, le gouvernement n'impose pas de frais d'inscription au Collège mais il a, en revanche, la ferme intention de le transformer en une Chambre d'enseignants classique. Toutefois, le fait que le gouvernement couvre les frais de fonctionnement du Collège va à l'encontre de sa volonté d'établir une entité jouissant de toute son autonomie. Le Collège est placé sous la responsabilité du ministre de l'Education, qui assure le fonctionnement juridique de l'organisme. Par ailleurs, les personnes officiellement chargées de définir la composition du Collège sont désignées par le ministère.

CSEE : Pensez-vous que ce Collège puisse défendre les intérêts des enseignants ?

PSZ-SEHUN : Plusieurs articles de la loi en question et des statuts du Collège portent atteinte à la liberté d'expression des enseignants. Le Collège national des enseignants dépend totalement du gouvernement, ce qui implique que les membres n'ont ni la possibilité de s'opposer aux propositions formulées par les autorités dans le domaine de l'éducation, ni de représenter ou de défendre les intérêts professionnels des enseignants. D'autre part, le gouvernement, avec le soutien du Collège, sera en mesure de faire passer n'importe quelles mesures, sans chercher à savoir si elles porteront préjudice ou non aux intérêts des enseignants et des élèves.

CSEE : Quelles sont les actions prévues par le PSZ-SEHUN dans ce cadre ?

PSZ-SEHUN : Le Collège national des enseignants est chargé d'élaborer un Code de déontologie régissant les normes de conduite des enseignants, devant être respecté aussi bien dans leur vie professionnelle que dans leur vie privée. A cet égard, le PSZ-SEHUN a engagé une procédure devant la Cour constitutionnelle, considérant que les activités du Collège national des enseignants portent atteinte aux acquis et aux droits des syndicats ainsi qu'à la liberté d'expression des enseignants. La plainte a été jugée non fondée et rejetée en raison de l'absence de preuves. Toutefois, nous ne baisserons pas les bras et nous continuerons à défendre les droits des syndicats d'enseignants.

CSEE : Merci d'avoir participé à cet entretien.

Budapest, 25 février 2015